A la fin de ce mois de juin 2021, l’association Per a Pace s’est rendue en Grèce dans la région du Péloponnèse, la ville de Lavrio, au sud d’Athènes, pour apporter la solidarité aux réfugiés kurdes installés dans deux camps, dont le premier se trouve au centre-ville et le second en périphérie. Au total,  15m3 de matériel solidaire, ont ainsi été transportés depuis la Corse.

Après avoir traversé l’Italie jusqu’à Bari, c’est à Patras que par bateau l’équipe composée de trois personnes, (Maurice Rénucci, Robert Armata et Jacques Casamarta) est arrivée en Grèce.   A Lavrio, c’est Jacques Leleu, le coordonnateur des diverses associations internationales, et Emmy, doctoresse et psychiatre grecque, qui nous accueillent. Ils nous présentent celui que nous appellerons Nurek, une des rares personnes parlant le français. Nurek nous invite à nous rafraichir dans la cafétéria solidaire et à faire plus ample connaissance.

Dans ce camp en centre-ville, constitué de deux bâtiments vétustes, mais propres et d’une cour centrale, il y a des réfugiés politiques kurdes, mais aussi des turcs progressistes solidaires de la cause kurde. Dans celui installé en périphérie, la vie est plus rude mais l’organisation est exemplaire. Ce ne sont pas des réfugiés « Lambda ».Ils se prennent en main, ils sont auto-organisés pour la vie quotidienne et la gestion du centre. Même si « le renouvellement de population » est important dans ces camps de transit, les responsables d’activités sont élu(es)par les réfugiés et les compétences professionnelles de chacun(e) utilisées à bon escient. C’est ainsi que dans chacun des camps, une salle de classe a pu être aménagée pour les enfants qui vivent dans le camp. La formation et l’éducation restent une priorité.

Le deuxième camp à la périphérie a été créé il y a plus de 4 ans, suite à la surpopulation due à l’afflux de migrants fuyants les guerres et les persécutions par les Turcs. Au début, il était constitué de mobil-homes à l’état brut et au fil du temps, il a été aménagé par les réfugiés eux-mêmes à l’aide de matériaux de récupération et avec le soutien des associations internationales. Les baraques sont entourées de plantations tels qu’arbres fruitiers, plantes d’agrément. Des petits jardins potagers ont été créés et les allées ont été recouvertes d’auvents apportant un peu de fraicheur. 

Dans celui du centre ville des aires de jeux pour enfants ont été aménagés, ainsi que des lieux de convivialité. Tout cela, ainsi que la gestion quotidienne est l’œuvre des réfugiés eux-mêmes. Dans ces deux camps, la communauté internationale est absente et n’apporte aucune aide, ni matérielle ni en terme d’organisation.

Delha, Gulistan et d’autres, dont nous ne pouvons ni citer les noms, ni montrer les visages sont autour de la table. Certains ont passé plusieurs années dans les prisons turques. Ces réfugiés politiques sont des nouveaux arrivants. Plusieurs ont combattu à  Kobane contre les islamistes de Daech et en remerciement ils ont été bombardés, pilonnés par la Turquie, deuxième puissance militaire de l’OTAN et c’est ainsi qu’ils se sont retrouvés sur les routes de l’exode pour arriver en Grèce.  En cause, la guerre imposée par Erdogan. Des villes, des villages ont été détruits. Des enfants, des femmes, des hommes sont aujourd’hui persécutés et plusieurs milliers sont détenus dans les prisons. En Turquie ou en Syrie les persécutions des kurdes sont quotidiennes.

On rappellera, que d’un point de vue de l’histoire, les Kurdes se retrouvent depuis le début du 20ème siècle et la fin de l’empire Ottoman  dans quatre pays, la Turquie, la Syrie, l’Iran et l’Irak.

Ces réfugiés, chassés de chez eux par les différents pouvoirs et les guerres, transitent à Lavrio dans l’espoir de trouver un pays d’accueil en Europe. Certains tentent le passage par la méditerranée sur des embarcations de fortune, et malheureusement, il arrive, qu’ils disparaissent dans l’anonymat

Dans les camps, et malgré les nombreuses difficultés et la dureté de la vie, nous avons trouvé des gens déterminés, combatifs, résistants, ouverts et empreints d’une grande humanité, des hommes et des femmes qui recherchent la paix et la justice. Des femmes et des hommes que la guerre a jeté sur les routes de l’exode et qui auraient préféré continuer à vivre dans leur village ou ville. Très clairvoyants sur le système politique actuel qui dirige le monde, ils prônent une autre vision de l’avenir.  

Au cours des deux journées passées à Lavrio, nous avons mesuré, combien les besoins sont importants et constaté que le matériel solidaire déposé, trouve là toute son utilité. Dans le contact avec ces populations, on comprend mieux l’importance de la solidarité qui ne se limite pas à l’aspect matériel, mais qui par les échanges et les rencontres rendent possible le rapprochement des cultures. Une humanité retrouvée.

Les deux camps implantés à Lavrio ne bénéficient plus des aides de la communauté internationale, en raison de la pression exercée par la Turquie auprès de l’Europe et du gouvernement grec. C’est ainsi que le monde associatif assure la solidarité internationale et que les réfugiés kurdes, particularité des camps, en assurent eux-mêmes la gestion : écoles, infirmerie, atelier de couture, cafétéria, aire de jeux… ainsi que la logistique générale des camps (entretien, distribution de la nourriture…). Ils se définissent eux-mêmes comme autogestionnaires.

Comme nous l’avions déjà signalé, cette action de solidarité n’a bénéficié d’aucune aide publique, Per a Pace avec ses partenaires a financé cette belle action citoyenne.

                                                                                                 Ajaccio le 13 JUILLET 2021.