Avant propos :
Du 22 au 29 mai 2000, l’association s’est rendue en Macédoine pour une action solidaire et citoyenne. La guerre au Kosovo, intervenant après celle de la Bosnie, a rendu encore plus précaire la situation des habitants de cette jeune république confrontés à une très grave crise économique et sociale.
C’est depuis 1992, en partenariat avec l’association « Pharmaciens de Corse », que « Per a Pace » intervient dans cette région des Balkans, au Kosovo, en Albanie et en Macédoine.
Six personnes et deux véhicules constituent le convoi. Monique Appietto, Fabienne Levallois, Pascale Larenaudie et Christian Micheli (père) participent pour la première fois à une action de solidarité. Jacques Casamarta et Alain Pen-Penic, quant à eux, connaissent bien la route, pour l’avoir déjà empruntée à plusieurs reprises.
Ils emportent avec eux des médicaments et du matériel médical qui seront remis aux médecins de l’hôpital de la ville de Stip, des livres pour enfants et des romans pour la bibliothèque française de la ville et des jouets, des vêtements, des boites de couches, ainsi que du lait en poudre, pour une structure associative, « l’Ambassade des Enfants », chargée d’accueillir des enfants dont les familles rencontrent des difficultés.
Ce déplacement en Macédoine, le cinquième pour l’association, est aussi l’occasion de rencontres et d’échanges. Christian Micheli auteur compositeur du groupe SIDOSIMI fait partie du voyage. A cette occasion le CD Stonde Felice sera présenté. Il est l’émanation d’un groupe d’élèves du collège du Finosello d’Ajaccio et c’est en partenariat avec le Secours Populaire Français et l’Education Nationale que l’association Per a Pace en a assuré la production.
Des rencontres, avec l’ambassade de France et le centre culturel français à Skopje, seront organisées. Celles-ci devraient permettre à ces jeunes musiciens et chanteurs, de rencontrer d’autres jeunes en Macédoine pour un échange culturel, probablement en 2001 ou 2002, si la situation du pays et de la région le permet.
Au total, au cours de cette initiative, c’est 3 230 kms qui seront parcourus entre la Corse et la Macédoine.
Le voyage :
C’est par un bateau de la Corsica Ferries que nous quittons la Corse en direction de Livourne le lundi 22 mai. A la douane de Bastia, nous sommes informés que dorénavant, la liste de médicaments devra être plus détaillée notamment pour la catégorie « psy…». Il faudra dorénavant et obligatoirement une attestation du ministère de la santé pour «l’exportation».
La route vers Bari (Italie) s’est faite sans encombre et le mardi nous sommes, comme prévu, embarqués sur un navire en direction de la Grèce. C’est à 20 heures, le mercredi soir après 500 kilomètres de routes encombrées par des poids lourds, que nous atteignons la frontière macédonienne.
Si les formalités de douane sont rapides à la frontière grecque, il n’en est pas de même à la frontière macédonienne. Il nous faut plus de quatre heures de contrôles administratifs avant de pouvoir reprendre la route en direction de la ville de Stip où nous arrivons vers 2 heures du matin.
Une Macédoine déstabilisée par la guerre au Kosovo.
Cela fait près de trois années que nous ne sommes plus retournés dans le pays. Notre dernier passage remonte à novembre 1997 et la situation semble avoir bien changée depuis cette date.
En premier lieu, la guerre au Kosovo, en 1999, a profondément déstabilisé toute la région et la proximité de la Macédoine avec ce pays a occasionné une exode massive des Kosovards. Deux cent cinquante mille, peut-être plus, tel est le nombre de réfugiés arrivés dans le pays. La communauté internationale sous l’égide de l’ONU a installé des centres d’accueils et fait parallèlement office de force d’interposition entre les différentes communautés.
Avec cette guerre, les rapports entre les macédoniens d’origine slaves et les macédoniens d’origines albanophones, notamment sur les frontières d’Albanie à l’ouest et du Kosovo au nord, se sont un peu plus dégradés. Les accrochages sont fréquents.
La situation économique n’est pas brillante, l’inflation est galopante, la production industrielle est en chute libre et 30% de la population active est au chômage.
Des changements politiques importants se sont également opérés en Macédoine. Le président de la république Kiro Gligorov âgé de 78 ans ne se représentait pas aux élections législatives de novembre 1998, et l’opposition du centre droit devait nommer Boris Trajkovski président de la république.
Journée du jeudi 25 mai – Visite de l’hôpital de Stip :
Nous savons en arrivant à l’hôpital de Stip que le directeur, monsieur Rambabov, avec qui nous avions sympathisés en 1993 n’était plus là. A la suite du changement de majorité politique il avait été remplacé, lui et son équipe.
Nous apprenons ainsi que les directions des établissements hospitaliers et probablement aussi par la même occasion, celles des autres services publics sont remplacés au gré des majorités politiques.
C’est la première fois que cela arrive, mais le véhicule enfermant le matériel humanitaire reste bloqué à la douane de Stip. Dans la journée nous apprenons que les lois ont été modifiées dans le pays et qu’il est fort probable que le matériel soit déchargé dans un entrepôt de la douane.
Nous consacrons la matinée à visiter l’hôpital et ses différents services de radiologie, de pédiatrie et d’orthopédie. C’est avec une réelle satisfaction que nous constatons que les berceaux remis par la clinique Comiti d’Ajaccio et déposés par l’association en 1993, pour le service pédiatrie, sont encore en place.
Depuis notre dernière visite en 1997, certains services ont fait l’objet d’une modernisation.
Une fondation japonaise a équipé l’hôpital avec du matériel ultra moderne. C’est ainsi que le service de radiologie est unique dans toute la Macédoine et que l’équipement informatique du centre de diagnostic est neuf et performant.
Toutefois certains de ces équipements sont très sophistiqués et nécessitent pour les médecins des formations adéquates qui font défaut. C’est le souhait qu’ils vont nous exprimer car le matériel est fréquemment utilisé en dessous de ses possibilités.
A notre retour, nous solliciterons l’antenne Corse de «Médecins du Monde», pour qu’elle réponde à cette demande et prenne contact avec l’hôpital de Stip.
Visite de l’école d’infirmières :
L’après midi Ilinka Stefanova, professeur de français à l’école d’infirmières, nous propose la visite de l’établissement qui dispense des formations d’infirmières mais aussi des spécialités para-médicales.
Le souhait est ici de s’équiper de matériel informatique, de stérilisateurs, d’un fauteuil dentaire, d’un mannequin à l’entraînement cardio-vasculaire etc. Les besoins sont très importants et c’est tout naturellement que nous envisageons notre aide future.
Depuis 1993 et à plusieurs reprises, l’association a aidé l’hôpital par l’envoi de matériel et de médicaments, mais l’intervention de la fondation japonaise sur l’équipement a permis d’améliorer la situation et les besoins maintenant se font ressentir au niveau de la formation médicale, ce qui nous incite à réorienter notre intervention.
La fin d’après midi est consacrée aux formalités de dédouanage qui s’avèrent compliquées. Heureusement l’aide de notre ami macédonien Boris Runtev est très utile, même si, comme on nous l’a annoncé dans la matinée, le matériel a été déposé dans le dépôt des douanes de la ville de Stip, malgré nos protestations.
Au delà du fait que nous ressentons cette situation comme anormale, nous comprenons à ce moment le changement politique intervenu dans le pays. Boris, quelque peu gêné, se voit désolé de cette situation, lui, qui aurait préféré que son pays donne une autre image.
Théâtre en soirée :
Le soir nous sommes invités à découvrir une création théâtrale comique intitulée «la clef». Le handicap de la langue ne nous empêche pas de découvrir une très belle interprétation, avec des acteurs macédoniens et bulgares.
Le théâtre de la ville de Stip est une belle structure qui a fait l’objet d’une rénovation. Il peut accueillir environ deux cents personnes. Au sous-sol est aménagé un espace, style piano bar, dans lequel à l’issue de la représentation nous rencontrons la direction du théâtre et les comédiens.
En 1997, lors d’une précédente visite, les responsables du théâtre avaient déjà exprimé le souhait de réaliser un travail de création ou de coopération avec un théâtre de Corse et c’est donc dans la suite logique de cette perspective que nous leur avons remis une documentation sur les créations du Théâtre Point d’Ajaccio.
C’est ensuite autour du projet culturel qui concerne le groupe SIDOSIMI que nous échangeons. Nous rencontrons un chanteur qui est aussi acteur de théâtre, Radé Raderogojarov, et une jeune chanteuse macédonienne Héléna Goloméva. La jeune chanteuse pratique aussi le piano au conservatoire de musique en Macédoine et espère pouvoir s’inscrire au conservatoire de musique de Nice. L’idée d’un échange séduit et nous partons avec la ferme conviction qu’il faut maintenant préparer les dossiers en relation avec l’Ambassade de France en Macédoine et le Centre Culturel Français.
Vendredi 26 mai 2000 – Visite et rencontre à la mairie de Stip :
C’est à 8h30 que nous nous rendons dans les locaux de la mairie de Stip. Monsieur le Maire nous y attend et prononce quelques mots de bienvenue. Les traditionnels cafés, jus de fruits et bonbons sont sur la table.
Nous rappelons au cours de cette entrevue le sens de notre démarche en Macédoine et nos actions depuis 1993, notamment sur l’hôpital de la ville.
Nous écoutons ensuite attentivement l’élu de la ville dont la population avoisine les 45 000 habitants. A la différence de la France, le maire et les conseillers municipaux en Macédoine sont élus pour quatre ans. Le conseil municipal est composé de 19 élus.
«Deux entreprises publiques sont actuellement financées par le budget communal, le théâtre et la police. Toutefois, il y a en cours de préparation un changement de loi pour élargir cette gestion à l’éducation et à la santé. La gestion locale reste malgré tout limitée»…et…«80% du budget actuel est attribué aux salaires».
C’est l’industrie textile qui prédomine dans la région de Stip. Les usines ont été privatisées et elles exportent principalement. On trouve également quelques fabriques de chaussures. L’agriculture y est peu développée et le chômage dans le secteur est très important.
Skopje la capitale – Rencontre à l’ambassade de France :
Il est plus de 9h30 lorsque nous partons à Skopje où nous espérons être reçus à l’Ambassade de France. D’importance moyenne, cette représentation diplomatique regroupe 35 personnes qui y travaillent, mais pour autant, tous les services y sont représentés.
Auparavant, c’était monsieur Henry Tardy qui était notre interlocuteur à l’ambassade. Celui-ci n’étant plus en poste en Macédoine, c’est madame DUBY, conseillère coopération qui nous reçoit pendant plus de deux heures. Cet échange nous permet de mieux appréhender les évolutions dans le pays, mais parallèlement il nous éclaire sur les mécanismes institutionnels chargés d’aider les projets de coopérations. C’est ainsi qu’elle nous propose pour les actions culturelles, de prendre contact avec le Centre Culturel Français de Skopje et les Alliances françaises dans d’autres villes du pays.
La conseillère coopération invite l’association à poursuivre le travail dans le domaine du livre et suggère l’envoi de bandes dessinées, plus ludiques pour l’apprentissage du français.
Avant de se quitter, elle nous indique que l’ambassade est intéressée par l’envoi de cassettes réalisées par FR3, ainsi que tous les documents ou vidéos réalisés en Corse sur la Macédoine, suite aux différentes actions de Per a Pace.